Aller au contenu
diapason sur rose

Les tribulations du diapason, de la Renaissance à nos jours.

Le diapason, c’est la hauteur de référence officielle de la note La que l’on utilise pour accorder les instruments de musique, que ce soit pour leur fabrication ou pour leur permettre de jouer ensemble. C’est également ce bel objet métallique à deux branches qui, bien qu’il existe depuis longtemps des accordeurs électroniques et plus récemment des applications, est encore bien utile. Il est peu encombrant, économe en énergie et parfaitement stable. Voici le son du la 440 Hz produit par ce diapason :

C’est une référence officielle et internationale, sur laquelle était aussi accordée la tonalité des anciens téléphones, tout du moins en France, mais qui a fixé cette fréquence, et quand ?

Au Moyen-âge, la notion de diapason n’existait même pas. Au 10e siècle un certain Odon de Cluny  recommande d’accorder un orgue ainsi : « Le C (do), grave donne le premier tuyau et aura une longueur quelconque ». A partir du 17e siècle commence à se développer l’orchestre, et avec lui le besoin de se donner un diapason, pendant deux siècles les hauteurs seront très variables d’un orchestre à l’autre, quelque part entre le sol et le si bémol.

Mais jusqu’au milieu du 19e siècle, globalement le diapason ne fait que monter, car une fois l’oreille habituée à un certaine hauteur elle va toujours apprécier la brillance et la nouveauté d’une légère hausse. C’est ce qui finit par poser problème aux chanteurs et à certains instrumentistes qui se trouvent aux limites de leur voix ou de leur instrument.

En 1858 se réunit une commission constituée de deux physiciens, sept musiciens et un général (pour la musique militaire), qui se fait envoyer une collection internationale des diapasons en vigueur. Le plus haut est à plus de 455 Hz, il choisissent un des plus bas. C’est ainsi qu’en France, le 16 février 1859, le diapason est ramené par arrêté ministériel à 435 Hz, mesure saluée par les autres pays d’Europe. En 1885, à l’issu d’une conférence internationale, il est adopté peu à peu par tous les pays, et les facteurs d’instruments doivent fixer leur accord d’après cette norme.

Mais ce n’est pas la fin de l’histoire, car malgré cette législation le phénomène naturel de hausse reprend, officieusement. Des mesures effectuées en 1938 font apparaitre des valeurs à nouveau hors-norme, jusqu’à 467 Hz à Prague, et même 470 Hz dans le jazz !

Une nouvelle commission est donc réunie à Londres en 1939, cette fois constituée surtout d’ingénieurs mais pas seulement, puisque c’est le compositeur de musique concrète Pierre Schaeffer qui y représente la France. Le diapason officiel est cette fois adjugé à 440 Hz, plusieurs tentatives sont menées dans les années suivantes pour revenir à 435 Hz et même pour descendre à 432 Hz, mais le 440 Hz tient bon.

En 1955 il devient la norme ISO R16 -1955, intitulée « Fréquence d’accord normale (fréquence musicale normale) », reconduite en 1975 avec ISO16-1975, décidée à l’unisson par le comité ISO. Ce dernier, composé d’industriels du monde entier, définit depuis son siège de Genève toutes les normes de la vie courante. On imagine que cela n’empêche toujours pas la musique de tendre inexorablement vers le haut.

Sources : Jacques Chailley, La Musique et le Signe, 1967, ISO-Focus, 2012.

.